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Colloque international "Truquer, créer, innover. Les effets spéciaux français" Cité des Sciences et de l’Industrie, Paris, 8-9-10 mars 2018
Les Éditions L’Âge d’Homme sont heureux de vous annoncer la parution du nouvel ouvrage de Mireille Berton : Le corps nerveux du spectateur. Voici le résumé de l'ouvrage :
Qu’y a-t-il de commun entre le cinéma et la psychologie au tournant du XXe siècle? Sur quelles bases peut-on rapprocher la pratique culturelle des projections lumineuses et les théories du psychisme? Comment comprendre l’intérêt des savants pour le cinéma et l’influence des sciences sur la manière d’appréhender l’expérience filmique ?
Cet ouvrage a l’ambition de répondre à ces questions en plaçant au centre de l’analyse l’imaginaire du corps nerveux – sensible, mimétique et perméable – qui circule alors dans plusieurs disciplines scientifiques jusqu’à imprégner une culture populaire plus diffuse.
Il s’agit en effet de constater – bien en-deçà des représentations filmiques qui avèrent l’emprise des troubles nerveux sur certains personnages – de s’interroger sur les processus qui contribuent à façonner une certaine vision des premiers spectateurs des vues animées. On constate que ceux-ci sont régulièrement considérés par les élites cultivées à l’image des névrosés qui déambulent dans les grands centres urbains et qui souffrent des aléas de la modernité industrielle.
Dans ce contexte, le cinématographe devient à la fois le signe et l’agent d’une culture de masse qui fragilise les organismes exposés au rythme d’une vie frénétique et automatisée par les nouvelles technologies du transport, du travail et du divertissement. Aussi, les « salles » de cinéma de l’époque apparaissent comme des « laboratoires expérimentaux » fabriquant à la chaîne des corps nerveux prisonniers de leur inconscient cérébral.
L’analyse des discours sur le corps nerveux permet par ailleurs de mettre en évidence le rôle clé joué par le cinématographe dans l’élaboration de théories de la subjectivité qui décrivent le psychisme à l’instar d’un appareil de projection. L’expérience filmique fournit souvent aux sciences du psychisme un exemple pertinent pour illustrer le fonctionnement de la neurasthénie ou de l’hystérie, le patient éprouvant régulièrement des hallucinations ou des rêveries qui rappellent par certains côtés la perception du spectateur.
Mais, plus fondamentalement, le cinématographe vient transformer les conceptions de la subjectivité humaine en offrant aux sciences du psychisme un véritable modèle de pensée : l’esprit humain ne serait alors rien d’autre qu’une sorte de projecteur intérieur produisant des petits « films » qui peuvent être revus à l’infini.
Au plan d’une histoire au long cours, cette étude apporte un nouvel éclairage sur les discours technophobes qui accompagnent l’avènement de tous les médias à l’ère industrielle, et ce depuis les premières technologies électriques jusqu’à Internet, en passant par la télévision et les jeux vidéo. Le cinématographe cristallise effectivement une série d’angoisses relatives à son potentiel nocif pour le corps et l’esprit de ses usagers, révélant son pouvoir d’impact sur l’imaginaire social.
Proposant au final une histoire croisée du cinéma et des sciences du psychisme, cet ouvrage souhaite livrer une réflexion interdisciplinaire qui accorde aux deux champs mis en regard une importance égale dans leur contribution à l’élaboration d’une subjectivité déterminée par la modernité et ses effets ambivalents, oscillant entre hystérie et hypnose.
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